Hommage à mes anciens élèves

Ce texte a été rédigé et publié en septembre 2016. Il est dédié de tout coeur à mes anciens élèves. Entretemps, Madame Sanchez a laissé la place à d'autres personnes au sein de l'enseignement ;)
August 13, 2020

Je viens de rentrer d’une magnifique promenade dans les bois.

Une heure de calme.

Juste mon chien & la nature.

Le bonheur, quoi.

Mais j’avais aussi cette envie de rentrer. De me remettre à écrire. Même si mon ego me répétait doucement Tu veux encore publier un article aujourd’hui? Tu n’en fais pas un peu trop? Tu crois pas que les gens vont trouver cette attitude prétentieuse? Franchement, je m’en fiche pas mal.

Hier, j’ai eu l’immense plaisir de lire un commentaire de Vanda, une des mes anciennes élèves. A la fin de mon article, elle m’a laissé quelques lignes.

Qui peuvent sembler anodines pour certaines personnes.

Mais moi, elles m’ont bouleversée. Vraiment touchée.

Être professeur, c’est vraiment l’un des plus beaux métiers du monde. Je ne dis pas cela pour avoir ma dose de kitsch dans mes écrits. C’est clair, corriger des devoirs en classe, préparer des cours pendant des heures (alors que tu sais pertinemment que seul 3% de la classe t'écouteront vraiment), il y a mieux. Et ce n’est pas non plus le côté du métier qui m’a le plus séduit. Mais voilà, cela fait partie du jeu. J’ai eu pas mal d’élèves ces huit dernières années. 140 en moyenne par année (je te laisse faire le calcul!).

Des élèves jeunes.

Des adultes.

Des appliqués.

Des fainéants.

Des gentils.

Des lunatiques.

Des léthargiques.

Des amusants.

Des frustrés.

Des bien habillés.

En uniformes.

Des ambitieux.

Des adorables.

Des inclassables.

Des inoubliables.

Vanda, tes mots m’ont tellement fait plaisir!

Je crois que tu fais partie des deux dernières catégories que je viens de citer.

Oui! Vanda avait toujours son caractère bien à elle. Attitude face au prof & au cours : Je te laisse venir Madame la Prof!  Montre-moi ce que tu veux m’apprendre. Je verrai bien si cela m’intéresse. Si tu es authentique. Tu me respectes, je te respecte.

Vous me direz, tous les élèves sont ainsi. Pas forcément.

Vous savez, le plus difficile quand on est prof, au quotidien, c’est de ne pas oublier.

Oublier qui tu es.

Oublier qui tu as devant toi.

Je l’ai vécu. Je sais aussi que c’est un réel défi de mémoriser tous les prénoms de nos élèves. Que c’est difficile de se souvenir du cadre familial de chacun d’entre eux. Mais il ne faut pas oublier, que nous sommes tous des êtres humains. Je ne dis pas que les élèves sont traités comme des animaux ou que tous les profs agissent comme des machines (qui fonctionnent…ou pas).

Calmez-vous confrères.

Je dis juste que parfois, on oublie.

Oui, c’est difficile  d’aller parfois au-delà des formules de mathématiques, des règles du COD/COI et des définitions de physique ou de biologie.

Mais n’oublions pas que même si la majorité du temps les gamins sont assis à l’école, bein leur coeur n’y est pas forcément.

Tout comme toi, eux aussi vivent leur vie.

Ont leurs soucis.

Leurs rêves.

Et soyons honnêtes, combien de fois accordons- nous de l’importance à ce qui les touche vraiment, EUX?

Eux aussi savent pertinemment que savoir conjuguer des verbes, connaître le théorème de Pythagore ou avoir des notions de latin c’est bien vu.

Et important.

Parfois.

Pour certains.

Mais voilà, ce qu’ils veulent vraiment c’est peut-être qu’on les laisse s’exprimer. Ouvrir leur coeur. Et pas juste la première leçon bidon en septembre où on leur demande de se présenter en deux minutes à la classe (Elevator Pitch pour les timides svp), lors d’une rédaction où tu dois imaginer ta vie dans dix ans ou lors d’un dessin en éducation artistique sous le thème Qui suis-je?

Oui, on vient à l’école pour apprendre. Et avoir du savoir -vivre.

Mais le savoir ne prime-t-il pas sur le vivre…la plupart du temps?

A la base, nous voulons transmettre notre savoir.

Inculquer des bases essentielles.

Leur donner les meilleures chances.

De réussir.

Mais de réussir quoi?

A résister.

À quoi?

À montrer quoi?

Non, moi non plus je n’aime pas les classes agitées. Et oui, je suis aussi loin d’être la prof parfaite. J’ai vécu pas mal d'expériences ces dernières années.

Des leçons chouettes.

Des catastrophiques, certainement.

J’ai eu des élèves qui vont se souvenir de moi.

Parce que j’étais chiante.

Parce que je corrigeais sans relâche leur fautes…

si +….? Imparfait!

Le passé composé du verbe mourir.  Non je suis mourru c’est juste du poisson!

Je tentais de leur faire découvrir le théâtre (hors des cours, le soir, le WE. Êtes-vous folle Madame?) , parfois Baudelaire et Rimbaud.

Certains me garderont en mémoire comme une folle.

Quelle prof utilise des textes de rap pour expliquer des figures de style?
Quelle prof nous fait écrire des textes de slam?

Mais bon, au moins le temps passe plus vite.

J’ai tellement appris grâce à mes élèves.

Et j’aimerais vous dire merci.

J’ignore combien liront ces lignes, mais sachez qu’elles viennent du fond du coeur.

Certains d’entre vous m’ont faire rire, beaucoup même.

D’autres m’ont fait pleurer (pas de désespoir, je vous rassure).

En m’ouvrant votre univers.

En partageant votre histoire.

Tout simplement en me faisant confiance.

J’ai eu des roses.

Des blanches, des rouges, même une bleu une fois!

J’ai eu des chocolats.

J’ai eu des gentils mots. Même tout un poème.

J’ai eu des remarques ironiques quand l’Espagne a perdu un match de foot.

Mais avant tout, j’ai eu l’honneur d’entrer dans vos vies. Et je ne dis pas cela ironiquement.

Vous vous souvenez de vos profs vous?

De ceux qui vous ont vraiment touché?

Ceux auxquels vous daignez laisser une place dans votre mémoire?

Sont-ils nombreux à côtoyer cet espace intime?

Pour ma part, pas plus de trois. Pourquoi? Parce qu’ils ont cerné mon monde.

Compris comment je vivais, ce qui me touchait.

Parce qu’ils me respectaient.

Ne se mettaient pas au-dessus de moi.

Ne me donnaient pas l’impression d’être une fille aux illusions dépourvues de sens.

Ils ont cru en moi.

M’ont encouragée.

M’ont motivée.

Aussi souvent que je le pouvais, je tentais de m’efforcer de garder en tête ce qu’ils ont fait pour moi, sans en faire trop. Et secrètement, je voulais en faire de même. Garder cette veine d’humain.

Ne pas oublier que c’est cela, l’essentiel.

Maintenant tu sais pourquoi tes mots me touchent tellement Vanda.

En lisant ton commentaire, je me suis reconnue. J’aurais pu écrire ces lignes à mes trois prof de coeur.

Je n’ai jamais osé.

Je maintiens mon avis.

Être prof, c’est l’un des plus beaux métiers du monde.

Et le plus compliqué.

Le plus ambitieux.

Être. Authentique. Ne pas oublier.

Que nous sommes tous des êtres humains.

Il suffirait d’effacer deux lettres pour rendre l’école

un lieu (in-) humain

Tu vois Vanda.

Tu me remercies d’être une source d’ inspiration.

Je te renvoie ce sublime compliment.

Tu m’as émue.

Tu m’as inspirée à écrire cet article.

Merci du fond du coeur.

Tu as toujours eu un caractère très fort.

Un bout de personnalité.

Authentique.

Ne perds jamais cette belle énergie!

Texte publié le 26.09.2016 sur mon ancien blog.